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11/28/2007

"Drôle" de rêve

Concept
La mort est un "concept" qui occupe trop de temps dans ma vie. Chaque jour, j'ai une pensée pour chacun de mes morts. Il y a les grandes et les petites morts. D'un côté je place les dormeurs sous pierres tombales à inscriptions dorées, de l'autre ceux et celles qu'on a simplement perdu de vue. Je pense aux uns comme aux autres tous les jours. Ca me prend du temps.
Il faut que je cesse d'imaginer les morts tels qu'ils auraient pu être, et les vivants tels qu'ils sont peut-être.

Il n'y a rien de spécifiquement morbide pourtant. La mort, ou plutôt l'histoire, ou encore le passé, me structurent, me portent. Je me sens comme chargé d'un devoir vis à vis de ceux qui m'ont aimé et qui ne sont plus près de moi. Ils me regardent ou pensent à moi peut-être, et ça m'embêterait de les décevoir.

C'est sous leurs regards que j'agis.

Cette nuit j'ai fait un "drôle" de rêve. Morbide celui-là
J'ai rêvé que je ressentais l'acte de mourrir. J'étais dans mon lit et je sentais la mort venir. La peur qui monte doucement, la douleur qui s'accélère, la sueur épaisse qui glisse dans votre cou, le coeur qui bat à vos tempes de plus en plus fort, de plus en plus vite, l'air qui commence à manquer, le bruit rauque de votre respiration encombrée, l'espace neutre de la chambre à coucher dans la nuit qui disparaît, doucement, inexorablement, de votre champ de vision, ce bruit éléctrique dans vos oreilles qui augmente, la panique qui vous gagne. Vous allez mourrir, vous le savez. C'est ici et maintenant.
Votre respiration s'accélère, mais l'air se raréfie encore, c'est de pire en pire. Bientôt vous criez, vos poings s'accrochent aux draps, tirent, tirent plus fort que jamais, à en crever, vous criez, vous hurlez, mais personne ne vient, personne ne vous entend plus. La douleur vous transperce comme une lance, vous vous redressez, le visage en arrière pour chercher l'air. Ca y est, vous savez, vous savez ce que personne ne peut plus dire, vous traversez l'étroit tunnel qui mène dans l'autre monde. L'espérience est extatique. La plus incroyable de toute votre vie. Vous bandez peut-être, comme un pendu.

Cliniquement correct
Quel mort nous réserve-t-on ? Une mort avec péridural. On naît sans douleur, on on meurt de la même façon. Cette nuit je suis mort aussi de cette façon, histoire de voir laquelle je préfèrais. A vous de deviner ?

Vous êtes dans cet hôpital depuis des semaines. C'est long. Le personnel est gentil avec vous, mais impersonnel, justement. On vient vous voir, la famille laisse des fleurs que vous regarder flétrir dans leur vase ou des chocolats que vous ne mangerez jamais. A mesure que vos douleurs augmentent, les infirmères ajustent les doses de morphine, si bien que vous ne ressentez plus grand chose, ni vous-même. Vous aimeriez parler, comprendre, mais votre esprit s'embrume de plus en plus souvent et de plus en plus longtemps. Vous tentez de vous battre, mais la porte de votre cerveau est fermée et vous n'avez plus la clef. Elle pend à la boutonnière de l'infirmière, inaccessible. Vous n'avez plus les mots. Vous rassemblez ce qui vous reste d'énergie pour relever vos paupières qui pèsent des tonnes, mais la force vous a définitivement abandonné. Depuis combien de temps vous battez-vous ? Vous n'en avez aucune idée : une seconde, trois semaines ? Que c'est stupide de finir ainsi. Bientôt vous dormez. Et vous ne savez même pas que vous êtes mort.

* J'apprends que Fred Chichin, des Rita Mitsouko est mort aujourd'hui. Il avait 53 ans. Il va rejoindre la cohorte de mes pensées affectives...

4 commentaires:

boronali 28 novembre 2007 à 18:14  

Fred Chichin mort ? Merde ! Ma veste à paillettes vient d'en prendre un coup ...

Le stress : une maladie de civilisation 28 novembre 2007 à 18:30  

Déconne pas, j'adorais ce mec. Depuis le début, je voulais être lui. Ce type avait la classe, un détachement, une posture et des vestes comme je les aime

Catherine Dauriac 29 novembre 2007 à 02:21  

très joli post. C'était mon ami de cœur.
Pour la veste il y a aussi celle de Sailor en léopard (Sailor & Lula). Fred est parti danser avec la sauterelle.

Le stress : une maladie de civilisation 29 novembre 2007 à 07:58  

J'aurais adoré porter ce genre de veste. Mais voilà, je n'étais que ridicule avec.

La veste jaune à revers dorée est restée dans mon placard, je ne la mettais que chez moi, et encore : juste quelques minutes de temps en temps, pour vérifier.

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